vendredi 31 décembre 2010

Mallikarjun Mansur, premier siècle


Le grand chanteur Mallikarjun Mansur aurait eu 100 ans aujourd'hui. Quand il chantait la musique la plus compliquée avait l'air parfaitement limpide. Je n'ai pas vraiment envie d'essayer de dire pourquoi c'est aussi bien. La musique doit prendre aux tripes, le reste est inutile. Voici un enregistrement qui doit être assez rare. Un concert au Festival Shankar Lal à Delhi en 1983:
http://www.mediafire.com/?nyb1wd8uyz2hz

Selon la cassette d'origine le premier raga est Yaman Sind (Sindhi Yaman). Je ne connais pas ce raga mais il semble qu'il s'agît tout simplement de raga Yaman. Suivent des variantes de raag Nat.

dimanche 12 décembre 2010

Les Steppes d'Asie



C'était à l'époque que j'écrivais mon roman "La Chanson de Roland". Je lisais tout sur l'Asie centrale. Un nom revenait sans cesse: Wilhelm Radloff, grand connaisseur des langues turques au dix-neuvième siècle, éditeur des grands textes épiques. Enfin, un de ces hommes dont on voit l'importance beaucoup plus tard seulement. Pas étonnant non plus que la propagande stalinienne le désignait comme ennemi considérable. Heureusement pour lui il était mort depuis longtemps.
Et voilà que je retrouve son nom dans la toute petite exposition du Musée Guimet, Hommes, Bêtes et Dieux de la Steppe. Dans une petite note. Il y avait aussi de belles antilopes en relief sur un vase:



Ce sont des paysages sans fin. Des milliers et des milliers de kilomètres. On passe en coup de vent. Il y a si peu de gens qu'il y a forcément quelque chose à dire quand on croise quelqu'un. Je n'irai sans doute jamais en Asie centrale. Ce n'est plus la peine. J'ai déjà écrit mon livre. Du coup c'est devenu un paysage mental. Un pays fait sur mesure.

jeudi 9 décembre 2010

Désolé


Chaque poète, même s'il ne s'en rend pas compte lui même, à un frère photographe. On ne fait jamais qu'illustrer le travail d'un autre. Le problème, bien sûr, est de rassembler ce qui est éparpillé et cela n'est pas facile. C'est le hasard. On voit une photo ou on lit un poème et soudain l'évidence saute aux yeux. C'est le "Déjà-vu". J'avais cela en regardant les photos du dix neuvième siècle à la Bibliothèque Nationale l'autre jour. Pas immédiatement, quelque jours plus tard je voyais mon livre des poèmes de Géorg Trakl (Das dichterische Werk) Un livre couleur sépia, comme les calotypes. Je me mets donc à lire



Blinde Klage im Wind, mondene Wintertage,
Kindheit, leise verhallen die Schritte an schwarzer Hecke,
Langes Abendgeläut.
Leise kommt die weisse Nacht gezogen,

Verwandelt in purpurne Träume Schmerz und Plage
Des steinigen Lebens,
Dass nimmer der dornige Stachel ablasse vom verwesenden Leib.
Tief im Schlummer aufseufzt die bange Seele,

Tief der Wind in zerbrochenen Bäumen,
Und es schwankt die Klagegestalt
Der Mutter durch den einsamen Wald

Dieser scweigendeen Trauer; Nächte,
Erfüllt von Tränen, feurigen Engeln.
Silbern zerschellt an Kahler Mauer ein kindlich Gerippe.

C'est merveilleux cette façon de commencer par un paysage qui peu à peu prend vie pour devenir un portrait. C'est pas gai en revanche. Trakl vient du pays de Thomas Bernard, ne l'oublions pas. Un monde désolé où l'on passe son temps à chercher une issue. En vain. Et pourtant, cette façon de retrouver toujours quelque part de l'humain est profondément réconfortant.



Am Abend schweigt die Klage
Des Kuckucks im Wald.
Tiefer neigt sich das Korn,
Der rote Mohn.

Schwarzes Gewitter droht
Über dem Hügel.
Das alte Lied der Grille
Erstirbt im Feld.

Nimmer regt sich das Laub
Der Kastanie.
Auf der Wendeltreppe
Rauscht dein Kleid.

Stille leuchtet die Kerze
Im dunklen Zimmer;
Eine silberne Hand
Löschte sie aus;

Windstille, sternlose Nacht.

(La première photo est de William Henry Fox Talbot, les deux autres de Peter Henry Emerson)

vendredi 3 décembre 2010

L'Histoire du Jardinier

Voilà l'étrange histoire d'un jardinier, pionnier des arts. On le voit d'abord en 1852, photographié par Adalbert Cuvelier. C'est un jeune homme encore:



On le retrouve à l'age mur dans un court métrage des frères Lumière. Le visage est désormais caché (attention: il s'agît de l'homme à gauche sur la photo):



Enfin, vers la fin de sa vie, avec une barbe mais le visage toujours caché. On apprend maintenant son nom: Vallier. Cézanne a fait plusieurs portraits de lui. Cela devient évident quand on connait l'histoire de cet homme qui a traversé l'histoire artistique du dix neuvième siècle: un des premiers à être pris en photo, filmé puis peint par le plus grand du siècle:

jeudi 2 décembre 2010

Calotypes

C'était la première fois que l'on pouvait tirer des photos en série. Là où le daguerréotype faisait concurrence à la peinture, le calotype allait sonner le glas de la gravure.
L'année dernière (je crois) il y a eu une exposition sur les photos primitives en Italie. C'était au Petit Palais. Aujourd'hui c'est la France avec une exposition à la BN. Beaucoup de différences? Non, pas énormément. Mêmes bonshommes artistes bohémiens ou gros bourgeois (peut être les mêmes à un age différent), mêmes paysages, souvent très beaux avec un panorama horizontal (le fleuve) ou vertical (la cascade). Dommage, je n'ai pas d'images et le dessin rend mal. Par contre une superbe photo de Charles Nègre: des ramoneurs qui marchent. Aucun visage. Tout est mouvement. Ceux qui pensent que la photographie a pris la place de la peinture réaliste doivent se rendre à l'évidence: la photographie annonce directement l'expressionnisme.