mardi 30 août 2011

Terrasser le Dragon


Pour accompagner un poème de Victor Segalen:

Hymne au Dragon couché

Le Dragon couché: le ciel vide, la terre lourde, les nuées troubles; soleil et lune étouffant leur lumière; le peuple porte le sceau d'un hiver qu'on n'explique pas.

Le dragon bouge: le brouillard aussitôt crève et le jour croît. Une rosée nourrissante remplit la faim. On s'extasie comme à l'orée d'un printemps inespérable.

Le dragon s'ébroue et prend son vol: à Lui l'horizon rouge, sa bannière; le vent en avant-garde et la pluie drue pour escorte. Riez d'espoir sous la crépitation de son fouet lancinant: l'éclair.



Hé! las! hé, Dragon couché! Enspiralé! Héros paresseux qui sommeille en l'un de nous, inconnu, engourdi, irrévélé,

Voici des figues, voici du vin tiède, voici du sang: mange et bois et flaire: nos manches agitées t'appellent à grands coups d'ailes.

Lève-toi, révèle-toi, c'est le temps. D'un seul bond saute hors de nous; et pour affirmer ton éclat,

Cingle-nous du serpent de ta queue, fais-nous malades au clin de tes petits yeux, mais brille hors de nous, - oh! brille!

Victor Segalen, Stèles

Travail (deux panneaux) terminé le 27 août 2011.

lundi 29 août 2011

Abstraction internationale


J'aimais beaucoup la peinture abstraite avant. Grands formats, des couleurs partout. L'exposition au Guggenheim de Bilbao Abstraction picturale, 1949-1969 : Œuvres choisies des Collections Guggenheim, 14 juin 2011 - 08 janvier 2012 m'a appris que l'amour dans l'art n'est pas éternel. On traverse les salles à la recherche d'un tableau ami. Heureusement qu'ils sont là: de Kooning, Pollock, Rothko. On est soulagé que l'abstraction puisse avoir un sens. Les autres tableaux me paraissent datés, "vintage". Enfin, ce n'était peut être simplement pas le bon jour pour voir cela.
La preuve: la collection permanente du Musée Esteban Vicente à Ségovie (leur site: http://www.museoestebanvicente.es )m'a paru très belle. Peinture reposante. Souvent à mi-chemin entre de Kooning pour l'énergie et Rothko pour les couleurs floutées. Il y avait un beau film de José Luis Guerin aussi. Un film qui donne envie de voir d'autres films. Le seul genre qui vaille.

dimanche 28 août 2011

Voix nouvelle


Pour accompagner cette œuvre abscons (désolé), un poème, dizain, non moins obscur de Maurice Scève. Un effort, c'est les vacances!

Toutes les fois qu'en mon entendement
Ton nom divin par la mémoire passe,
L'esprit, ravi d'un si doux sentement,
En autre vie et plus douce trépasse;
Alors le Cœur, qui un tel bien compasse,
Laisse le Corps prêt à être enchâssé,
Et si bien a vers l’Âme pourchassé
Que de soi-même et du corps il s'étrange.
Ainsi celui est des siens déchassé
A qui fortune ou heur ou état change.


(poème extrait de "Délie de Maurice Scève. Le panneau intitulé "Ventriloque" terminé le 20 août)

mercredi 17 août 2011

La règle d'or

Je me souviens du Musée de l'Or à Bogota en Colombie, une sorte de coffre fort énorme. Le spectateur est prévenu: il s'agît de décourager les voleurs. Les objets sont précieux. Cette confusion entre prix et beauté m'avait interpellé à l'époque. Personne ne pense à voler une pyramide. En revanche, l'or peut être fondu, ramené à son état naturel sans perdre sa valeur. Voilà ce qu'il ne faut pas oublier quand on travaille avec du papier!
Le Musée de Beaux Arts de Bilbao en Espagne organise une exposition d'objets précolombiens du Musée de Bogota. Peu de portes à double tour ici. Tout est discrètement protégé. L'accent est mis sur l'objet.
L'or, de par sa valeur, a souvent été trop travaillé, trop ciselé. On ne peut pas présenter un cube d'or comme un cube de graisse de Joseph Beuys. L'or a été plus souvent une matière pour les artisans. En Colombie ce n'était pas le cas. Il y a des objets parfois assez bruts (les plus beaux). Internet ne donne aucun objet exposé vraiment exceptionnel et mes croquis faits sur place manquent de jaune. Les images viennent donc du musée de Bogota.

(Jusqu'au 4 septembre au Musée des Beaux Arts de Bilbao)